Avis de la CRSA sur les objectifs régionaux d’accès aux études en MMOP

La région Pays de la Loire est confrontée à une forte évolution démographique et des ressources professionnelles insuffisantes pour répondre aux besoins de santé projetés. Suite à la suppression du numerus clausus, la CRSA a été sollicitée par deux fois afin d’émettre des avis sur les formations en Médecine, Maïeutique, Odontologie et Pharmacie. Au sein de ces avis, la CRSA plaide pour une augmentation des professionnels de santé formés.

La région Pays de la Loire est confrontée à une forte hausse des besoins de santé projetés. Son taux d’évolution démographique, très supérieur à la tendance nationale (une projection à 4,5 millions d’habitants en 2050, représentant une augmentation de 18%, soit + 8 points par rapport à la tendance nationale) s’accompagne d’un vieillissement de la population (la part des 65 ans représentait 18 % de la population en 2012, et représentera 28 % de la population en 2050) touchant particulièrement la Vendée et la Côté Atlantique (36 % de la population aura plus de 65 ans en 2050).

A ces caractéristiques démographiques se confrontent un niveau de ressources professionnelles insuffisant pour répondre aux besoins de santé. En effet, en 2021, 11 320 médecins (ensemble des médecins) exerçaient en Pays de la Loire (49 % de médecins généralistes et 51 % de médecins spécialistes), soit 299 médecins pour 100 000 habitants. Cette densité se situe 12 % en dessous de la moyenne nationale (341 médecins pour 100 000 habitants). Les départements de la Mayenne (-0,6 % de médecins généralistes et –0,8 % de médecins libéraux depuis 2016) et de la Sarthe (-1,3 % de médecins généralistes et -2,1 % de médecins libéraux) sont particulièrement marqués. L’APL moyenne aux médecins généralistes libéraux âgés de moins de 65 ans s’élevait à 3,4 consultations par habitant en 2019 (3,5 en France), avec des disparités importantes selon les secteurs géographiques : 3,9 en Loire Atlantiques et Maine et Loire contre 2,7 en Sarthe et Mayenne, faisant partis des départements français ayant les plus faibles APL moyennes. De plus, depuis 2016, l’APL moyenne aux médecins généralistes libéraux âgés de moins de 65 ans a diminué de 1,3 % par an en moyenne (-1,5 % en France), avec des disparités territoriales (-0,6 % en Loire Atlantique, –2,7 % en Vendée).

Dans un contexte de besoin croissant de professionnels de santé aux échelles nationale et locale, laccès aux formations de médecine, de maïeutique, d’odontologie et de pharmacie (MMOP) a été rénové par deux dispositions de la loi du 24 juillet 2019, relative à l’organisation et à la transformation du système de santé. Celles-ci suppriment le numerus clausus et diversifient les voies d’accès à compter de la rentrée universitaire 2020-2021.

Dans ce cadre, une concertation régionale a eu lieu entre novembre 2020 et février 2021, auxquelles ont pris part la CRSA, l’ONDPS et les UFR, ainsi qu’une concertation nationale engagée par les ministères MSS et MESRI avec l’appui de l’ONDPS. Cette dernière s’est conclue par une conférence nationale qui s’est tenue le 26 mars 2021. L’arrêté du 13 septembre 2021 a fixé les objectifs nationaux pluriannuels pour la période 2021-2025 et la répartition par région.

En Pays de la Loire, la concertation a concerné deux présentations en CRSA en novembre 2020 avec un avis rendu par la conférence en décembre 2020, une présentation en CSOS, et une réunion de synthèse avec un comité régional élargi le 10 décembre 2020. Des échanges ont également eu lieu entre l’ARS et les facultés.

Au sein de son avis du 10 décembre 2020, la CRSA demandait que tous les leviers soient mobilisés afin d’accroître le nombre de professionnels de santé formés dans les prochaines années. Des leviers nationaux: en réduisant les inégalités de répartition des professeurs d’université praticiens hospitaliers sur le territoire national, en développant des postes d’assistants hospitaliers universitaires et en augmentant les capacités matérielles. Ainsi que des leviers locaux : en mutualisant les enseignements fondamentaux, en ouvrant des antennes à distance, en multipliant et diversifiant les terrains de stage dès l’externat, en réfléchissant aux possibilités nouvelles qu’offrent les outils numériques et de formation à distance. La CRSA soulignait de plus l’importance de prendre en compte les organisations nouvelles, l’évolution de l’exercice professionnels et des métiers par les responsables enseignants et les lieux de formation. Et également l’importance que l’État et les collectivités locales soutiennent les facultés, afin que ces dernières et les responsables enseignants puissent accueillir de façon durable et former davantage.

Cette concertation a permis d’argumenter une augmentation des effectifs à former. Toutefois, les Universités, bien que constatant le besoin de former plus d’étudiants, expriment aujourd’hui encore leurs difficultés à le faire, lié aux moyens, à l’encadrement, aux ressources humaines, aux locaux disponibles.

La CRSA a été de nouveau sollicitée le 2 décembre 2021, pour émettre un avis sur les propositions des UFR de Nantes et Angers concernant leurs évolutions capacitaires pour l’accès en première année des seconds cycles des études de MMOP, pour les années 2021-2025, en amont de l’avis donné par l’ARS.

A partir des éléments présentés, les membres de la CRSA ont échangé sur différents enjeux. Se conjuguent aux problématiques liées à l’évolution démographique de la région et aux ressources professionnelles actuelles, une vague de départs en retraite dans de nombreuses professions. Les effets de ces augmentation capacitaires ne seront de plus observables que sur le long terme : un début d’exercice dans 5 à 10 ans pour les professionnels et enseignants formés actuellement. D’autres professions sont également concernées par un nombre insuffisant de personnes formées : les transporteurs sanitaires, les assistants de régulation médicale.. Des problématiques transversales aux différentes formations ont été identifiées : les abandons en cours de formation face à la réalité du terrain notamment pour les infirmiers et aides-soignants, les difficultés pour les professionnels à accompagner les étudiants en stage, le manque d’attractivité de certains territoires pour l’installation de jeunes médecins …

Face à ces constats, la CRSA a émis un avis défavorable sur les objectifs proposés par les UFR. Dans la continuité de l’avis donné en 2020, elle considère que les objectifs fixés, y compris dans leur borne haute, restent insuffisants pour couvrir les besoins de santé actuels et à venir. Elle demande que tous les leviers soient mobilisés pour accroître le nombre de professionnels et s’engage à participer à la co-construction d’un projet avec l’ensemble des partenaires concernés, en se fondant sur la réalité des besoins régionaux.

Les discussions ont fait apparaître le besoin d’apporter une réponse globale, comprenant l’accompagnement, l’organisation des soins, la qualité de vie au travail, l’attractivité des territoires. Il est pour cela nécessaire de renforcer les liens avec le territoire, en associant les collectivités locales, les Conseils Départementaux, le Conseil Régional..

Plusieurs pistes concrètes ont été proposées afin de dépasser les entraves actuelles. Le manque d’enseignants pourrait être pallié en partie par le recours à la visio-conférence, ainsi qu’à des formateurs non universitaires, permettant également de renforcer la transversalité des formations. Les maîtres et lieux de stage pourraient être élargis, avec la mise en place de maîtres de stage a vocation territoriale par exemple. De plus, l’accélération du transfert de compétences (aux infirmiers, aides-soignants, sages-femmes, podologues…) permettrait un meilleur recours aux soins.

Pour aller plus loin :

-Avis sur les objectifs régionaux d’accès aux études en MMOP de la CRSA du 2 décembre 2021  Fichier pdfTélécharger le document

-L’accessibilité potentielle localisée (APL) est un indicateur prenant en compte les besoins différenciés en fonction de l’âge de la population, la disponibilité des praticiens en termes de volume d’activité et l’offre de médecins à proximité immédiate de la zone concerné. Elle s’exprime en nombre moyen de consultations accessibles par an et par habitant.

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